Triste Journée
La démocratie n'est pas gouvernée par le peuple pour le peuple, mais bel et bien pas ceux qui ont le plus de pognon: Les grandes compagnies. Le capitalisme à pris le pas sur la démocratie.
On le savait déjà, bien entendu. Aujourd'hui n'en est qu'un triste rappel.
DRM: C'est quoi, et pourquoi?
Du temps ou tout support musical et vidéo était analogique (avant l'avènement du CD donc), tout allait bien. Vous pouviez copier une cassette ou un disque vynil en toute quiétude. Le processus, long, pas pratique et d'une qualité non-optimale était une limite naturelle à la propagation des copies illicites. Vu qu'il y a une exception dans le droit français pour la copie privée, tout cela allait gaiement de pair. Et le support d'origine vieillissait suffisamment vite pour vous obliger à vous en reprocurer un neuf aprés quelques centaines d'écoutes - pour vos albums ou films favoris donc. Les cassettes de dessins animés que vous aviez acheté pour vos enfants n'étaient plus vraiment utilisables pour vos petits-enfants.
Tel était le 'business model' que connaissait les 'major' alors. Aidées par la technologie (la possibilité de dupliquer un album et de le vendre à des milliers d'exemplaires), elles gagnaient beaucoup d'argent.
L'avènement du CD a quelque peu changé la donne. Enfin... Pas vraiment l'avènement du CD, mais plutôt l'avènement du lecteur et du graveur de CD que l'on trouve sur un ordinateur. La copie est rapidement devenue trés rapide et trés fiable. On pouvait copier un CD 'à l'identique' en quelques minutes. Pire! Internet a vite permis de partager cette copie avec le monde entier en quelques clics.
Je pense pouvoir affirmer sans me tromper que personne n'y voit là un acte d'une grande moralité. Même les personnes farouchements opposées au DADVSI. Mais les majors sont devenues hystériques à ce propos.
L'action numéro 1 aura sans aucun doute été d'affubler les DVD d'un méchanisme de protection contre la copie, que nous appellerons CSS pour la suite. Il ne fallait pas reproduire l'erreur du CD. Malheureusement, ce méchanisme de protection a été contourné assez vite par un programme appellé DeCSS. Le méchanisme de protection du DVD n'était plus.
Pendant ce temps, les majors de la musique ont commencé l'action numéro 2: Attaquer en justice les personnes qui mettaient à disposition des musiques sur des réseaux P2P (Peer-To-Peer). Ils justifiaient leurs actions avec des chiffres ridicules sortis tout droit de leur chapeau. Genre: Les téléchargements online nous ont coûté 2000 milliards de dollars en manque à gagner. Ces affirmations étaient etayées par des chiffres en baisse. Mais rappellez-vous qu'on était alors en 2001 et qu'il y avait une crise mondiale des technologies. Au regard du reste de l'économie, l'industrie de la musique se portait plutôt bien.
Malheureusement, ces actions en justice n'ont fait que générer de nouveaux réseaux afin de se protéger. Elles n'ont en rien dissuadé les internautes de télécharger ni de partager.
La troisième action aura donc été d'attaquer l'auteur du logiciel de contournement de la protection du DVD (DeCSS) et tous ses canaux de diffusion en justice... Malheureusement, aucune loi ne précisait quoi que ce soit à ce sujet, et les cours de justice se sont retrouvées impuissante face au problème posé.
La quatrième action - en cours de finalisation en France - a été de rendre tout méchanisme de contournement de CSS (et des autres futurs méchanismes de protection) illégal. S'acheter une loi dont les majors avaient besoin: Le DADVSI. Aux états-unis, cette loi est passée depuis quelques années déjà: Elle s'appelle le DMCA.
Voilà pour le résumé. Tout cela semble presque logique si on ne regarde pas dans le détail. Il y a cependant deux points qui rendent au yeux des technophiles cette course en avant pathétique et alarmante:
- Cette loi donne aux producteurs de musique la mainmise sur TOUS les fabricants de lecteurs de DVD. Cela inclut notamment les logiciels pour PC. Tous ces constructeurs doivent recevoir l'autorisation des producteurs afin d'avoir le droit de "lire" un DVD. Les problèmes générés sont multiples: Pouvoir des majors qui peuvent réfuter ledit droit à tout moment, indisponibilité d'un lecteur logiciel sous Linux, etc.
- Cette loi ne changera rien, car toute méthode de protection contre la copie est par définition contournable. toutes l'ont été jusqu'à présent et tout indique que cela va continuer.
La loi DADVSI en quelques mots, la version commentée
R: L'apparition des fichiers numériques a changé la possibilité d'échanges de fichiers. Effectivement l'ampleur de ces échanges ne cesse de croître. Elle a aussi changé la capacité de reproduire l'original de l'oeuvre à l'identique sans dégradation de qualité et sans limite.
R: Les internautes se sont habitués à une offre très importante et à la possibilité d'y avoir accès immédiatement.
R: La France et l'Espagne sont les deux pays Européens qui n'ont pas encore transposé la directive européenne...
R: Oui, c'est l'alternative crédible à la piraterie...
Quant au 'passage à un nouveau modèle de diffusion', comme précisé ci-dessus, je ne voit pas ce que cette loi va changer. Il est déjà illégal de télécharger sur les réseaux P2P et il est déjà légal de vendre de la musique sur internet...
R: La gratuité assèche la création...
D'autre part, on peut tous constater une baisse importante de la production des artistes les plus riches: Michael Jackson, Sting, Madonna, et j'en passe des centaines.
Attention encore! Personne ne dit que les artistes ne méritent pas une rémunération! Je dis simplement que plus de pognon pour les artistes ne génère pas forcément une dynamisation de leur créativité, plutôt le contraire.
R: Le droit d'auteur repose sur le consentement de l'auteur. Le fait de copier l'oeuvre est nécessairement une exception...
R: Tout d'abord le projet de loi va garantir le droit essentiel à la copie privée...
Voilà qui promet d'être inefficace. Au vu du lobbying que les sociétés productrices sont capables d'effectuer (la preuve: L'europe - presque - entière s'est dotée de leur projet de loi), ca promet de ne pas être trés équitable. Et dans tous les cas, trés lent. Quand les 'major' auront décidé d'outrepasser leurs droits, il faudra attendre qu'une association de consommateur se réunisse, prenne les devants, attaque en justice (ou devant le collège des médiateurs), gagne. Enfin, une action pourra être prise. Tout cela avec trés peu de risques pour les majors (regardes, tout ce qu'ils risquent c'est une 'injonction'. Scénario le pire: Ils doivent le faire. En d'autres termes, rien à perdre.
Comme on peut le voir, leur terrain de jeu est agréable.
Comment affirmer avec cela que la loi 'garantit le droit essentiel à la copie privée'?
Et les 'plate formes de musique en ligne qui permettent 5 copies'? On ne parle plus de 'copier une oeuvre pour soi et ses proches'... Le périmètre du droit à la copie privée est donc bien impacté! Sans compter que avec les plateformes de téléchargement existantes vous avez en effet droit à 5 copies, mais elles vous sont exclusivement réservées! Pas question de partager avec des proches sans leur donner votre mot de passe! C'est un peu gros...
R: Le téléchargement illégal diminuera parce que chacun préférera télécharger légalement sur un site où il trouvera facilement l'oeuvre qu'il recherche à un prix attractif et dont il sera sûr de la qualité.
R: Un logiciel libre est un logiciel dont les conditions d'utilisation - la licence - donne à l'utilisateur le droit d'utilisation, de modification, de rediffusion et de réutilisation, parfois sous certaines contraintes. Cela suppose la disponibilité du code source - c'est-à-dire de l'écriture originale du logiciel. Ils sont bien souvent accessibles gratuitement.
R: Non, pas du tout. Le logiciel libre à toute sa place. Il doit simplement pouvoir protéger les oeuvres non libres de droit qu'il véhicule. Il est donc essentiel qu'il puisse avoir accès - dans certaines conditions - aux données techniques des mesures de protection. Le texte du projet de loi traite ce sujet.
R: la réponse graduée c'est d'abord un système de prévention grâce à des messages d'avertissement. L'internaute qui téléchargera illégalement risquera une contravention d'un montant peu élevé alors qu'il risquait 300 000 Euros d'amendes et trois ans de prison.
R: L'interopérabilité c'est le fait de pouvoir lire n'importe quelle oeuvre sur n'importe quel matériel. C'est essentiel pour le consommateur.
R: Bien sûr! Encore faut-il une impulsion de niveau législatif, ce que le projet de loi propose.
R: Il permet - et c'est un point très important - une véritable exception pour la reproduction des oeuvres au bénéfice des associations de handicapés qui aujourd'hui rencontrent beaucoup de difficultés pour les dupliquer.
R: Créer les conditions pour l'innovation et la création la plus diversifiée sur internet. permettre le démarrage d'une offre légale de qualité accessible pour l'internaute. La diversité culturelle a tout à y gagner.
Pour conclure, il est clair que cette diatribe publique essaye de nous enfumer en nous faisant croire que le projet de loi règle le problème de la piraterie sur internet, alors même qu'il ne traite pas le problème. Tout le monde est contre la piraterie (qui pourrait être pour) et donc tout le monde devrait être pour ce projet de loi.
Le problème c'est que ce projet de loi n'est pas à propos du Peer-To-Peer, mais à propos des DRM. Et il est intéressant de voir que le text ne les mentionne pas.